YANN ROUSSEAUCORRESPONDANT À TOKYOCORRESPONDANT À TOKYO

AU TOKYO MOTOR SHOW, LES CONSTRUCTEURS JAPONAIS ÉQUIPENT LEURS PROTOTYPES DE SYSTÈMES D’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE. DES SYSTÈMES CAPABLES DE LIRE LES ÉMOTIONS DES CONDUCTEURS ET D’INFLUER SUR LEUR CONDUITE.
Le rêve de David Hasselhoff se réalise enfin. Trente-cinq ans après la sortie de la série « K2000 », basée sur les prouesses de KITT, une Pontiac Firebird noire dotée d’une intelligence artificielle brillante, les constructeurs automobiles

développent des habitacles intelligents
se projetant en partenaires des conducteurs, bien au-delà de l’assistance dans les virages difficiles ou les coups de frein d’urgence. « On se dirige vers une conduite augmentée », analyse Vincent Cobée, le nouveau patron de la stratégie produit chez Mitsubishi Motors.
Le groupe japonais,

passé sous le contrôle de Nissan l’an dernier,
présentait mercredi au Tokyo Motor Show son e-Evolution, un nouveau prototype de SUV électrique équipé, notamment, de logiciels de reconnaissance et de synthèse vocales
capables de générer des échanges simples
entre l’ordinateur de bord et les passagers. « La voiture va apprendre à connaître de mieux en mieux son conducteur afin d’interagir plus complètement avec lui », détaille le Français. Sur le stand épuré de Toyota, Makoto Okabe présente son Concept-i Series, qui veut aussi mieux percevoir les émotions humaines. « C’est beaucoup plus qu’une machine, souffle le manager du projet. Un ensemble de capteurs, de caméras, de microphones et de logiciels nous permettent d’analyser les expressions faciales, la tonalité de la voix ou le langage corporel du conducteur afin de comprendre son état mental et d’intervenir sur sa conduite. » Le véhicule peut ainsi identifier un état de stress et tenter d’apaiser le conducteur en changeant de lui-même l’illumination de l’habitacle, la température de l’air conditionné, le volume sonore ou le confort du siège. De même, il perçoit des signes de fatigue quinze minutes avant que le conducteur ne les ait lui-même ressentis. « On capte les mouvements de la bouche, une main qui gratte inconsciemment la joue ou des ébauches de bâillement », détaille Makoto Okabe. Dans ce cas, la voiture cherchera à réveiller l’attention du conducteur. Un siège qui vibre ou qui se contracte légèrement. Un changement de volume du son de la radio. Puis la suggestion d’une pause dans l’un des restaurants ou cafés identifiés par la voiture comme l’un des favoris du conducteur.
L’intelligence artificielle de sa voiture pourra, en effet, puiser dans ses SMS, son compte Twitter ou sa page Facebook, ainsi que dans l’historique de son GPS, pour analyser ses goûts et ses préférences en matière de nourriture, de musique ou d’intérêts. « Mais il faudra que cet accès ait bien été autorisé auparavant », insiste l’ingénieur, qui pointe

le débat sur le respect de la vie privée.
Imiter un passager humain
Pour Honda, cette intelligence artificielle jouera en quelque sorte le rôle d’un passager humain, qui sait aujourd’hui capter un état de stress ou des signes de fatigue et donne des conseils au conducteur. « Dans notre concept NeuV électrique, l’assistant automatique, qui dispose du niveau de conduite autonome le plus complet, peut ainsi proposer de prendre le contrôle lorsqu’il a repéré des émotions particulières chez le conducteur », détaille Hideo Furukawa, l’un des créateurs du véhicule. Si la plupart des constructeurs japonais espèrent mettre en scène ces innovations dans des véhicules de démonstration lors des Jeux Olympiques de Tokyo en 2020, ils prévoient une introduction graduelle dans leurs gammes au cours des années qui suivront. « Ce ne sont toutefois pas des technologies que les constructeurs pourront simplement imposer. Il faudra que cette intelligence artificielle soit choisie et adoptée par les conducteurs », prévient Vincent Cobée.
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