Ces derniers mois ont-ils marqué un retour à meilleure fortune ou un simple répit pour les grands groupes financiers français ? Cette rentrée sera cruciale pour juger de la pérennité du relatif retour au calme qu’ils ont connu ces derniers mois. Sept ans après le déclenchement de la crise financière – que la France a traversée de façon plutôt moins chaotique que ses voisins européens – les grandes banques du pays ont en effet signé un premier semestre 2015 très satisfaisant. Parmi les assureurs, AXA, de son côté, a enregistré sur cette période son meilleur semestre en matière de chiffre d’affaires et de résultat opérationnel.

Les acteurs ont bénéficié de la reprise progressive de l’économie dans la zone euro. Dans le même temps, le secteur a poursuivi ses efforts en matière de réduction des coûts. Mais les incertitudes demeurent nombreuses : la bonne dynamique du crédit doit encore se confirmer, alors même que le climat – au beau fixe avant l’été – est devenu très variable au mois d’août avec le krach boursier chinois. L’accord sur la Grèce doit aussi encore faire la preuve de sa pérennité. Autre variable à surveiller : le cadre réglementaire, notamment les exigences en fonds propres qui pèsent sur l’activité. Après des années de tour de vis, les grands arbitres mondiaux pourraient adoucir leur approche. Mais cette inflexion reste aussi à confirmer d’ici à la fin de l’année. Revue des principaux défis de la rentrée.

Le crédit doit encore transformer l’essai

Un à un, les voyants passent au vert. Longtemps aux abonnés absents, les emprunteurs reviennent un peu plus nombreux aux guichets des banques, en particulier pour solliciter des crédits à l’investissement. En juillet, d’après l’enquête mensuelle de la Banque de France, une nette majorité d’établissements s’attendaient en outre à un accroissement de la demande de crédit de la part des PME. Un refroidissement de l’économie pourrait toutefois interrompre ce mouvement… qui n’est pas uniforme. Ainsi, certains signaux contrastés demeurent, en particulier concernant les micro-entreprises. Au cours du deuxième trimestre, leurs encours de crédit de trésorerie comme d’investissement ont reculé. Ces prochaines semaines, le Médiateur national du crédit devrait d’ailleurs dire si les banques ont bien tenu leurs engagements à l’égard de ces petites entreprises pour faciliter leur accès au crédit.

Le « TLAC » en ligne de mire

A ces interrogations conjoncturelles, il faut ajouter des incertitudes réglementaires. Le prochain sommet du G20, qui se tiendra à la mi-novembre dans la station balnéaire turque Antalya, sera l’occasion pour les gendarmes financiers de présenter la forme définitive du « TLAC », ce nouveau coussin de fonds propres que les banques doivent détenir à partir de 2019. Ce dernier vise à éponger les pertes d’une banque placée en résolution et qui aurait déjà carbonisé l’ensemble de ses capitaux propres. Le but est de s’assurer que les fonds publics ne soient pas ou très peu sollicités.

La question est de savoir comment bien le dimensionner pour ne pas peser excessivement sur la capacité des banques à accompagner la reprise. Sans attendre, celles-ci ont recommencé à émettre de la dette éligible au calcul de ce nouveau ratio. Quant aux Etats – en Allemagne et en Italie -, ils examinent actuellement de nouvelles dispositions qui rendront l’atteinte du TLAC plus aisée pour leurs champions nationaux.

L’heure de vérité approche pour les banques grecques

 

C’est l’angle mort de la zone euro : quelques semaines après les négociations très dures entre Athènes et ses créanciers, personne ne sait encore précisément comment se portent les quatre grandes banques grecques (qui représentent 90 % du marché), rincées par des mois de retrait des dépôts et le contrôle des capitaux qui a suivi. Le montant de la recapitalisation à venir – 10 à 25 milliards d’euros qu’apporterait le Mécanisme européen de stabilité (MES) – sera fermement établi par la Banque centrale européenne (BCE). Celle-ci a dans cette optique déjà commencé l’opération vérité : elle mène actuellement un bilan de santé du secteur qui sera suivi d’un test de résistance, dont les résultats devront être publiés fin octobre.

Pour l’heure, les autorités grecques viennent d’ajouter une dose de suspense en repoussant du 31 août au 30 septembre la date limite à laquelle les quatre grandes banques pourraient publier leurs résultats du premier semestre. A priori cantonné à la Grèce – à la grande différence de la crise souveraine de 2011, qui avait vu les taux d’emprunt des Etats du sud de l’Europe s’envoler -, l’épisode reste surveillé de près, afin d’éviter tout phénomène de contagion aux banques européennes.

Vers un assouplissement du plafond des bonus ?

Les régulateurs européens ont par ailleurs limité depuis janvier le bonus des banquiers au montant de leur fixe, l’envolée des variables ayant été un des facteurs de la crise financière. Mais ils n’excluent pas désormais de revenir en arrière. En mai, l’Autorité bancaire européenne a ouvert une consultation sur les nouvelles règles de rémunération des banquiers et notamment la possibilité de les appliquer de manière proportionnelle en créant des exemptions pour les petits établissements. Elle examine actuellement les 70 réponses de la place financière qui lui ont été adressées et formulera une recommandation sur le sujet d’ici à décembre. La Commission pourrait y être favorable. Elle s’est en effet déjà préparée à revoir son texte puisqu’elle a publié début août un rapport sur la directive bancaire dans lequel elle dit envisager une révision des clauses d’ici à juin 2016.

Complémentaire santé : sprint final pour équiper les entreprises

Côté assureurs, mutuelles et institutions de prévoyance, ces prochains mois constitueront un sprint final pour équiper, comme l’impose désormais la loi, tous les salariés du privé d’une complémentaire santé d’entreprise d’ici au 1er janvier 2016. Ce marché fait l’objet d’une véritable foire d’empoigne depuis plusieurs mois. Et la compétition devrait redoubler d’intensité. D’autant qu’un grand nombre d’entreprises sont désormais équipées. D’après une étude récente réalisée pour l’Association française de l’assurance et la Mutualité Française, c’était déjà le cas en avril pour 71 % des TPE (et même pour 86 % pour celles de 6 à 9 salariés), qui forment le gros des entreprises ne proposant pas encore un régime de frais de santé. Seules 15 % des PME, entreprises de taille intermédiaires (ETI) et grandes entreprises n’étaient pas encore pourvues à cette époque-là. 

A.D., E.Le. et L.T., Les Echos