C’est toujours « non ». Comme déjà mercredi dernier, l’Elysée a écarté hier toute renégociation des règles d’assurance-chômage avant l’expiration, mi-2016, de la convention entrée en vigueur le 1er juillet. « Rien de nouveau sous le soleil. Le sujet n’est pas à l’ordre du jour », tranche l’entourage de François Hollande, déplorant « une confusion entre le fond du débat et le tempo ». « Aujourd’hui, une réforme des allocations chômage n’est ni possible ni souhaitable », insiste-t-on à l’Elysée. « Nous avons toujours dit que le sujet ne se posait pas avant 2016. Cela n’a pas changé », confirme un proche de Manuel Valls. Au sommet de l’Etat, on dénonce l’ « hystérisation » du débat public en rejetant la faute de cette polémique sur les médias.
Reste qu’après le pataquès provoqué la semaine dernière par des propos de Manuel Valls jugeant « légitime » le débat sur le niveau des allocations, c’est Emmanuel Macron lui-même qui a remis de l’huile sur le feu. Dans une interview au « JDD », le ministre de l’Economie, ancien conseiller économique de l’Elysée, a jugé que la réforme négociée au printemps par les partenaires sociaux « est insuffisante » et qu’ « on ne pourra pas en rester là ». Le locataire de Bercy a prévenu que l’Etat pourrait « reprendre la main » si les blocages « sont trop lourds ».
La menace est toutefois peu crédible et le débat sur le tempo vite vu. « Il n’y a pas lieu dans l’immédiat de renégocier ; d’ailleurs, ce n’est pas possible », comme l’a pointé hier François Rebsamen, le ministre du Travail. De fait, après avoir agréé en juin la nouvelle convention Unédic, l’exécutif n’a pas les moyens légaux d’obliger les partenaires sociaux à revoir leur copie s’ils le refusent. Or les syndicats l’excluent catégoriquement. Certes, l’Etat pourrait exercer une très forte pression en menaçant de ne pas renouveler sa garantie sur la dette de l’Unédic, mais une telle option, par le risque qu’elle ferait peser sur le bon versement des allocations des 2,3 millions de chômeurs indemnisés et par la guerre qu’elle provoquerait avec les syndicats, n’est guère réaliste.
Reste, comme l’a pointé Emmanuel Macron, que le niveau du déficit de l’Unédic (3,8 milliards d’euros en 2014, ce qui portera la dette cumulée à 21,4 milliards, un record) a de quoi inquiéter l’exécutif, un phénomène accentué par la pression que met Bruxelles avant de donner son aval, ou non, au budget 2015. Cet hiver, lors des négociations avec les syndicats, le patronat pointait lui aussi la nécessité de réduire le déficit pour « garantir la pérennité du régime », même si la faiblesse actuelle des taux permet, pour l’instant, à l’Unédic de financer sa dette à bas coût.
Toute hausse de cotisations étant exclue, les efforts ont porté sur les dépenses : les mesures entrées en vigueur (réforme de l’intermittence, hausse du différé d’indemnisation, etc.) doivent permettre d’économiser 830 millions en 2015. Mais l’Unédic tablant sur une poursuite de la hausse du chômage, ces efforts n’empêcheront pas le déficit d’atteindre encore 3,5 milliards d’euros l’an prochain. Pour aller vraiment plus loin sans augmenter les cotisations, une seule solution : réduire le niveau et la durée des allocations, une piste qu’avaient exclue cet hiver, et continuent d’exclure dans un contexte de chômage de masse, les syndicats.
En commençant, par ses déclarations, à faire infuser l’idée dans le débat public, l’exécutif semble les inviter à se préparer, comme l’opinion, à l’idée. Selon un sondage Odoxa-« Le Parisien », 59 % des Français – et 40 % des sympathisants de gauche – sont favorables à l’instauration d’allocations dégressives.