Ils auront mis du temps. Mais les assureurs viennent enfin d’avancer des chiffres qui montrent en quoi, selon eux, le projet de loi présenté le mois dernier par Benoît Hamon sur la résiliation à tout moment des contrats d’assurance automobile et habitation est « une fausse bonne idée ». « La réalité n’est pas celle que l’on veut nous faire croire. Le diagnostic n’est pas juste », a martelé hier Bernard Spitz, le président de la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA), à l’occasion d’une conférence de presse commune avec Gérard Andreck, son homologue au Groupement des entreprises mutuelles d’assurance (Gema).
Selon eux, il serait illusoire de croire qu’une telle mesure va entraîner une plus grande concurrence et une baisse des prix de l’assurance, comme l’espèrent les services de Benoît Hamon. Avec 150 acteurs en assurance auto et habitation,« le marché est déjà très concurrentiel », objectent-ils. Selon une étude réalisée par le cabinet Accenture à leur demande, la prime moyenne d’une assurance auto est plus faible en France (391 euros), qu’aux Pays-Bas (401 euros) et qu’au Royaume-Uni (447 euros), deux pays où les consommateurs peuvent changer d’assureur à tout moment, soulignent-ils.
Autre argument avancé, « les assureurs français n’ont pas de marge de manoeuvre » en raison de la situation de déficit technique des marchés automobile et habitation. A l’inverse, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont desratios combinés (frais et sinistres rapportés aux primes) égaux ou inférieurs à 100 %, signes qu’ils sont équilibrés ou profitables. Quant aux taux de résiliation, les assureurs les trouvent déjà « très significatifs ». Ils atteignent 14 % en auto par exemple, ce qui est quand même loin des 33 % du Royaume-Uni.
Pour la FFSA et le Gema, il s’agit aussi « de protéger la mutualisation » apportée par l’annualité des contrats. « Tous les calculs que nous faisons tiennent compte de la saisonnalité des risques », explique Gérard Andreck, faisant allusion au fait qu’il y a plus de cambriolages de résidences principales l’été et l’hiver, de dégâts des eaux en hiver ou d’accidents de moto au printemps et en hiver, par exemple. Faute de savoir combien de temps l’assuré restera chez eux, les assureurs pourraient à l’avenir « prendre une marge de sécurité », prévient-il. Autrement dit, appliquer un surcoût.
« Il est bien tard »
Interrogés sur l’impact tarifaire possible, les assureurs disent qu’ils sont en train de refaire leurs calculs. « Mais on peut tout à fait imaginer une hausse de 5 à 10 % en responsabilité civile », indique Gérard Andreck. Pour la FFSA et le Gema, il serait bien plus judicieux et plus simple de rendre possible la résiliation pendant une durée d’un mois après l’échéance du contrat. « C’est une proposition que nous aurions aimé faire en temps utile s’il y avait eu une consultation », regrette Bernard Spitz, s’étonnant de l’absence de toute concertation préalable. Aujourd’hui, Gérard Andreck reconnaît qu’ « il est bien tard ». Alors que le texte de loi doit passer le 25 juin devant l’Assemblée nationale, les assureurs vont continuer leur travail de lobbying.