Les mutuelles étudiantes gèrent-elles de façon efficace la Sécurité sociale étudiante ? Non, répond l’association UFC-Que Choisir, qui rendait publique hier une enquête sur les dysfonctionnements de ces mutuelles. Régime spécifique unique en Europe, la Sécurité sociale étudiante créée en 1948 ne dépend pas des caisses d’assurance-maladie, mais fait l’objet d’une délégation de service public auprès d’organismes privés. Les mutuelles étudiantes assurent le régime de sécurité sociale de base pour 1,75 million d’étudiants et bénéficient à ce titre d’une subvention de l’ordre de 52 euros par étudiant ainsi que du remboursement intégral des dépenses de soins.
Dominé jusqu’en 1971 par une seule mutuelle, le marché compte aujourd’hui dix mutuelles régionales et une mutuelle nationale, la LMDE, émanation de la MNEF, dissoute à la suite d’un scandale financier en 1998. UFC-Que Choisir dénonce « une concurrence aberrante sur une activité de service public » et appelle à remettre le régime étudiant « dans le giron de la Sécurité sociale ». Interrogée sur cette éventualité, la Caisse nationale d’assurance-maladie n’a pas souhaité faire de commentaires.
L’association de consommateurs a adressé une lettre de mise en demeure aux mutuelles étudiantes, au risque de saisir la justice, et se dit prête à solliciter une réforme auprès de la ministre de la Santé, Marisol Touraine. Un rapport de mission est d’ores et déjà attendu au Sénat pour la première quinzaine d’octobre. Le groupe de travail sur la protection sociale des étudiants doit formuler des propositions concrètes en vue d’améliorer le système. Mais il ne devrait pas, a priori, remettre en question la délégation de service public (voir ci-dessous).
Economies d’échelle
Selon UFC-Que Choisir, une réforme permettrait pourtant de générer 90 millions d’euros d’économies d’échelle. L’association juge les mutuelles étudiantes « trois fois plus coûteuses que l’assurance-maladie ». Leurs frais de gestion sont estimés à 13,7 % des remboursements, contre 4.5 % pour l’assurance-maladie. La LMDE conteste « les modalités de calcul » de l’UFC. « On attend leur courrier afin de pouvoir leur répondre », a déclaré la porte-parole. L’association s’est également penchée sur la qualité du service, et notamment sur les délais de délivrance de la carte Vitale. Un tiers des étudiants attendent plus de trois mois pour l’obtenir. Des lenteurs qui s’avèrent d’autant plus cruciales que 30 % des étudiants ont déclaré renoncer aux soins en 2011 pour des raisons financières. Les étudiants sont, par ailleurs, très mal informés sur leur couverture santé. 43 % d’entre eux ignorent que les remboursements sont identiques quel que soit l’organisme.
Chargées d’assurer le régime de base, les mutuelles étudiantes proposent aussi à titre privé des complémentaires santé. Or près de 40 % des nouveaux inscrits à l’université ignorent que cette complémentaire n’est pas obligatoire et qu’elle peut être souscrite auprès d’autres mutuelles. UFC-Que Choisir, qui a comparé les offres de 23 opérateurs, relève que les garanties proposées, en moyen et haut de gamme, sont 20 % plus chères que les complémentaires classiques. Deux étudiants sur trois ne souscrivent pas de complémentaire en raison du coût, estiment les sénateurs.