Comme une ritournelle, la question de la réforme de l’assurance vie revient régulièrement. Cette fois, c’est la très sérieuse Cour des comptes qui a présenté, jeudi, un rapport argumenté sur le sujet. « La fiscalité des produits d’assurance vie est insuffisamment orientée vers la détention longue », observe Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes.
Pour la haute juridiction, l’objectif historique de la politique publique en faveur de l’assurance vie n’est plus rempli. Il s’agissait de développer la contribution des assureurs au financement de l’économie en leur permettant de collecter une épargne longue auprès des ménages, celle-ci étant stimulée par une incitation fiscale. Or, moins de la moitié des placements du secteur de l’assurance sont en actifs d’entreprises résidentes, soit 444 milliards d’euros à fin 2010, observe la Cour. Et, « moins de 10 % des placements portent sur des titres – actions et obligations – d’entreprises non financières résidentes », insiste le rapport, tout en reconnaissant l’investissement dans des obligations bancaires contribue indirectement au financement de l’économie. Par ailleurs, les placements des assureurs ont un horizon moyen de 6 à 7 années seulement, précise Didier Migaud qui remarque que les besoins de financement des PME n’ont pas rencontré le succès attendu, notamment l’engagement des assureurs de consacrer 2 % des ses actifs au non coté.
Quant à l’efficacité des dispositifs fiscaux de l’assurance vie, « ils ne peuvent être prouvés », selon le rapport, qui évalue à 1 milliard d’euros les allégements fiscaux. Un montant qui « va très vraisemblablement augmenter à moyen terme » alors que la recette issue de l’impôt sur les revenus de l’assurance vie ne dépasse pas 400 millions. De plus, « l’incitation fiscale ne bénéficie véritablement qu’à une minorité d’épargnants détenteurs des contrats d’assurance vie les plus importants », note Didier Migaud.
Pas de chambardement
Le rapport préconise donc différents changements : calculer l’avantage fiscal en fonction de l’historique des versements et non de la date d’ouverture du contrat ; moderniser le régime fiscal des rentes viagères afin de privilégier la sortie en rente ; redéployer l’incitation fiscale actuelle des produits d’épargne retraite vers les ménages à revenus moyens et modestes. Même si selon Didier Migaud, le rapport ne propose pas « le grand chambardement », la Cour recommande en tout cas « de revoir l’ensemble de la fiscalité de l’épargne ». Séverine Sollier