Les assureurs européens s’y préparent, mais renâclent. Car la forme que prend Solvabilité 2 n’est pas vraiment celle qu’ils avaient espérée. « Nous sommes dans un scepticisme constructif. Nous sommes depuis le début favorables à Solvabilité 2, mais le diable est dans les détails et nous ne pouvons pas nous contenter d’indications bienveillantes », déclare Henri de Castries, PDG d’Axa. Avant d’ajouter que selon l’issue des dernières discussions, « Solvabilité 2 sera soit une réussite soit un échec total ».
Plusieurs points importants font encore sortir les assureurs de leurs gonds. « La volatilité est le problème majeur. Il faut mettre en place des mécanismes pour l’atténuer. Et il faut que l’EIOPA ait des outils pour contrer les situations imprévisibles », affirme Alex Wynaendts, PDG d’Aegon.
Une autre incertitude plane sur les problèmes de distorsion de concurrence que Solvabilité 2, uniquement appliquée en Europe, risque d’engendrer pour les groupes d’assurance présents à l’international. « Pour les sociétés européennes qui ont des ambitions mondiales, il va falloir trouver rapidement des solutions d’équivalence », prévient Alex Wynaendts.
Jérôme Grivet, directeur général de Crédit Agricolegricole Assurances, déplore quant à lui la non convergence de Solvabilité 2 avec la réglementation comptable, qui sera « source de complexité et de dysfonctionnements supplémentaires ».
Au final, Henri de Castries n’a pas mâché ses mots et a multiplié les métaphores filées tout au long de ses interventions pour bien faire passer le message : « Des questions assez substantielles n’ont pas été réglées. Et il est difficile de construire une maison lorsque les plans ne sont pas arrêtés. En situation de pression, on pourrait s’apercevoir de défauts de construction majeurs. Pardon de mettre les pieds dans le plat avec brutalité, mais mon niveau de crainte n’est pas tout à fait de zéro ! » Et sa conclusion est sans appel : « Si le régulateur ne veut aucun risque, nous n’aurons aucun produit. Et l’Europe risque de mourir guérie de défauts supposés. » L.F.