L’ouragan de la crise des dettes souveraines de 2011 a éteint les derniers espoirs de Dexiade redevenir une grande banque pérenne. L’établissement franco-belge va être contraint à une restructuration en profondeur de ses activités.
Car si rien n’est fait, la division d’actifs toxiques nommée « legacy division » – presque intégralement responsable de la perte de 4 milliards d’euros au deuxième trimestre 2011 de Dexia – aura sa peau. Cette division est composée en majorité d’un portefeuille obligataire décoté d’une maturité moyenne de 13 ans, qui pèse 95 milliards d’euros. « Le problème n’est pas la qualité du portefeuille – qui est bonne – mais sa taille », indique une porte-parole de Dexia, qui ajoute que « la crise des dettes souveraines ne permet plus au groupe de soutenir la ?legacy division? aujourd’hui ».
Dexia ne peut plus refinancer cette activité : son besoin de financement à court terme s’élève aujourd’hui à 96 milliards d’euros. Dexia est du coup condamnée à sortir les actifs non-stratégiques trop consommateurs de liquidités de son bilan.
« Éléments dangereux »
Pour les accueillir, le ministre des Finances belge Didier Reynders milite pour une structure de défaisance, avec garantie des États : « Nous devons regarder comment changer ce groupe. Nous devons retirer tous les éléments dangereux de la banque, c’est là que les garanties d’État entreront en jeu – c’est ce que l’on appelle une ?bad bank? – puis on pourra donner des garanties aux clients, qu’ils soient des déposants ou des solliciteurs de crédit ». La nouvelle « bad bank » regroupera tous les actifs non stratégiques que Dexia n’arrive pas à vendre.
Dans le même temps, Dexia cherche « une solution de développement d’avenir » pour chacune de ses activités stratégiques que sont Dexia Banque Belgique, Dexia Crédit Local en France, la banque turque Denizbank, les Services aux investisseurs institutionnels et la gestions d’actifs.
En France, plus aucun doute n’est permis. La Caisse des dépôts (CDC) et la Banque Postale travaillent bien à la reprise d’une partie des activités de financement et du portefeuille de crédits aux collectivités de Dexia, a concédé un porte-parole de Dexia. Une source proche de la CDC indique de son côté que la caisse veut par ce projet assurer « la pérennité du financement des collectivités locales tout en gardant la préoccupation de protéger les épargnants français et la note triple A de la CDC ». Il ne resterait plus qu’une validation d’ordre réglementaire et juridique, affirme un proche du dossier.
Ce projet de transfert de l’activité de financement des collectivités locales diminuerait en tout cas de 80 milliards d’euros le bilan de Dexia, un allégement salvateur au vu des problèmes de liquidités de la banque. Mais il inquiète les élus qui réclament une solution urgente pour le financement des investissements locaux.
La banque de détail turque de Dexia, DenizBank, pourrait pour sa part être vendue. Elle était supposée représenter 27 % des revenus de Dexia en 2014 et pèse déjà plus de 4 milliards d’euros dans le bilan de la banque.
La question est maintenant de savoir si ces nouvelles mesures pourront permettre à Dexia de survivre sans l’aide des États.
La France n’a pour l’instant pas l’intention d’y injecter de fonds publics. « Ce n’est pas d’actualité », a indiqué une source gouvernementale à l’agence Reuters. Pour les pouvoirs publics, Dexia souffre d’un problème de liquidités mais n’est pas à cours de capital.
Les États français et belges se tiennent prêts à intervenir. Le gouvernement belge devait se réunir mardi soir en séance extraordinaire pour faire le point sur la situation de Dexia. En parallèle, la banque nationale de Belgique travaille avec la Banque de France et les autorités nationales des deux pays pour soutenir les mesures entreprises par Dexia.
Mais les salariés n’y croient pas. « L’ensemble du groupe Dexia serait à vendre », a indiqué mardi le secrétaire général du syndicat belge Setca pour le secteur de la finance, Jean-Michel Cappoen. « C’est la fin d’une route. Maintenant, différents chemins vont être offerts à chacun. Les salariés sont inquiets. On n’en est même pas au stade de savoir quels seront les impacts sociaux », indiquait de son côté Pascal Cardineaud, représentant du syndicat français CFDT.