LAURENT THÉVENIN
CETTE DISPOSITION DE LA LOI SAPIN II A ÉTÉ INVALIDÉE PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL POUR DES RAISONS DE PROCÉDURE. LES PARTISANS DU DROIT AU CHANGEMENT ANNUEL DE L’ASSURANCE-EMPRUNTEUR NE DÉSARMENT PAS.
Nouveau coup de théâtre dans le dossier de l’assurance-emprunteur. Les consommateurs ne verront finalement pas le droit de changer tous les ans l’assurance de leur crédit immobilier gravé dans le marbre. Le Conseil constitutionnel a en effet retoqué jeudi soir la disposition de la loi dite « Sapin II » qui instaurait cette possibilité.
Cet article avait été introduit par les députés, à la surprise générale, en nouvelle lecture du projet de loi sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique, fin septembre. C’est sur ce point que porte la censure du Conseil constitutionnel. Celui-ci a invalidé les dispositions de l’article 82 relatives à la résiliation annuelle de l’assurance-emprunteur pour des questions de forme. « Introduites en nouvelle lecture, ces adjonctions n’étaient pas, à ce stade de la procédure, en relation directe avec une disposition restant en discussion. Elles n’étaient pas non plus destinées à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d’examen ou à corriger une erreur matérielle. Adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires », justifient les sages de la rue Montpensier.
Cette décision vient doucher les espoirs des assureurs « alternatifs » qui tentent de se faire une place sur ce marché aux marges rondelettes face aux contrats « groupe » des banques et qui avaient fait beaucoup de lobbying pour obtenir le changement annuel. « C’est une décision procédurale. C’est une très bonne nouvelle pour les emprunteurs car la mutualisation est préservée. Elle permet un accès large à l’assurance du crédit immobilier », se réjouit en revanche la Fédération bancaire française.
La mesure votée par les députés devait, selon ses promoteurs, permettre d’ouvrir définitivement ce marché, dominé de manière écrasante par les banques qui vendent leurs contrats d’assurance maison en même temps que le contrat de prêt. Il s’agissait de compléter la loi Hamon de 2014. Celle-ci donne la faculté de changer de contrat dans l’année suivant la signature du prêt, à condition d’en présenter un offrant des garanties équivalentes. Au-delà de la première année, elle écrit que le contrat de prêt « peut » prévoir une faculté de substitution du contrat d’assurance en cas d’exercice par l’emprunteur du droit de résiliation mentionné dans le Code des assurances.
Clarifier le droit
Selon le député socialiste Pierre-Alain Muet, qui a porté l’amendement sur la résiliation annuelle voté par des élus de différents bords politiques, cette formulation laisse planer une ambiguïté « dont se sont emparées les banques pour en déduire que, au-delà d’un an, si elles n’étaient pas stipulées dans le contrat, la résiliation et la substitution n’étaient plus possibles ». « Il y a donc urgence à clarifier le droit », affirme-t-il. Il entend proposer de nouveau cette mesure dès que l’occasion législative se présentera. « C’est un retard déplorable, mais le mouvement est lancé et le combat continue », déclare Securimut, l’entité spécialisée dans l’assurance-emprunteur de la Macif et de la Maif.
Ce qui est prévu aujourd’hui
La loi Lagarde de 2010 permet à l’emprunteur d’opter pour l’assurance de son choix si le contrat alternatif qu’il présente à sa banque présente des garanties « au moins équivalentes ».
La loi Hamon de 2014 rend possible le changement de contrat dans l’année qui suit la souscription du prêt, sous réserve que le nouveau contrat soit d’un niveau de couverture au moins équivalent au premier.
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