Big bang en vue dans le monde de l’assurance santé. Les deux plus grandes mutuelles françaises, Harmonie Mutuelle et la MGEN (Mutuelle générale de l’Education nationale), travaillent à un rapprochement. « Nous en sommes au stade de discussions en vue de construire un groupe », explique aux « Echos » Joseph Deniaud, le président d’Harmonie Mutuelle, confirmant les révélations du site Fil-social.com. Les deux groupes doivent présenter leur projet à la presse le 12 janvier. Vendredi, la MGEN ne faisait pas de commentaire.

S’il se concrétise, ce rapprochement marquera un tournant dans la recomposition à marche forcée du secteur (lire ci-contre), sur fond de contraintes réglementaires et économiques de plus en plus grandes. Ensemble, Harmonie Mutuelle (2,5 milliards d’euros de cotisations en santé l’an dernier pour plus de 4,5 millions de personnes protégées) et la MGEN (2,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour quelque 3,7 millions de personnes protégées) donneraient en effet naissance à un acteur véritablement dominant. D’autant qu’ils sont chacun au centre d’une union mutualiste de groupe (UMG). Harmonie Mutuelle est la tête de pont de l’UMG Groupe Harmonie, tandis que la MGEN fait partie du groupe Istya, qui réunit cinq autres mutuelles de fonctionnaires.

« En l’état actuel, les discussions se déroulent entre Harmonie Mutuelle et la MGEN. Mais l’objectif est de faire en sorte que toutes les mutuelles qui font partie de nos UMG respectives participent à cette démarche », précise Joseph Deniaud. La démarche engagée est « structurante », précise-t-il. Si rien n’est encore décidé à ce stade, elle pourrait déboucher sur la création d’une UMG, une forme juridique qui implique des liens de solidarité forts. D’après Joseph Deniaud, il faudra « probablement au minimum une année » pour donner corps au projet. « Mais nous n’avons pas l’habitude de traîner en route », souligne-t-il, alors qu’Harmonie Mutuelle est elle-même issue d’un nombre inimaginable de fusions.

Cette perspective d’un rapprochement entre la première mutuelle interprofessionnelle française et la plus grande mutuelle de la Fonction publique résonne en tout cas comme une déflagration. « C’est un peu comme si AXA et Allianz fusionnaient », résume un bon connaisseur du secteur. Les deux mutuelles sont souvent présentées comme ayant peu d’atomes crochus. « Je sais que notre démarche étonne, mais nous sommes plutôt complémentaires », fait valoir Joseph Deniaud. Les coopérations existantes entre la MGEN et Harmonie Mutuelle se limitent pour l’instant à des investissements dans la Mutualité française bourguignonne ou au champ de l’aide à la complémentaire santé. « C’est un projet complexe sur les plans opérationnel et politique », estime un observateur avisé. In fine, les deux groupes devront arriver à convaincre leurs assemblées générales de la pertinence de ce mariage inattendu. 

Laurent Thévenin, Les Echos