Le lobbying de la Mutualité française a fini par payer. Le gouvernement a fait marche arrière sur la complémentaire santé des plus de 65 ans. Il a modifié, in extremis, l’article 21 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, afin de supprimer toute référence à une « mise en concurrence » des contrats, qui devait initialement conduire à une « sélection » de ceux bénéficiant d’un coup de pouce fiscal.

Le nouvel article, adopté par les députés lundi soir en deuxième lecture du texte, mentionne juste une « labellisation » qui devrait permettre la coexistence d’un plus grand nombre d’offres. En contrepartie, l’avantage fiscal pour les organismes assureurs est réduit : il tombe de 2 % du montant des primes à 1 %.

Jusqu’à la semaine dernière, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, ne voulait pas démordre de la procédure de sélection. Pourtant, une partie des députés de la majorité s’y opposaient. L’idée de la ministre était de reproduire ce qui avait été fait pour les bénéficiaires de l’ACS (Aide à la complémentaire santé) en juillet dernier : seule une dizaine de contrats avaient été retenus.

Mais les mutuelles ne voulaient pas de cet encadrement et de cette segmentation croissante du marché. Elles ont réussi à convaincre l’Elysée et Matignon d’imposer une modification du projet de loi.

Elles ont obtenu un compromis : « La labellisation n’était pas notre choix de départ. Ce n’est pas non plus la solution que nous attendions à la suite de notre congrès en juin, où François Hollande avait promis de faciliter l’accès des personnes âgées à la complémentaire santé. Mais c’est une voie de sortie », reconnaît Etienne Caniard, le président de la Mutualité française. Les mutuelles veilleront aux décrets d’application qui définiront les « paniers de prestations », et les « seuils de prix », car à leurs yeux, ils peuvent encore receler de mauvaises surprises. Elles ont obtenu que l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) y jette un oeil. L’Autorité de la concurrence sera également consultée.

 

L’effet d’un pétard mouillé

Les mutuelles fournissent 70 % des contrats individuels. Un processus de sélection aurait favorisé les offres low cost en mettant l’accent sur le prix. Alors que le point fort des mutualistes, c’est justement la solidarité, la péréquation entre générations. « Les trois-quarts de nos contrats ont des cotisations qui n’augmentent pas plus vite que l’âge des souscripteurs, alors que chez les assureurs, seuls 15 % des contrats répondent à cette exigence », souligne ainsi Etienne Caniard. Reste à savoir si ces aides à la complémentaire santé des seniors ne vont pas faire l’effet d’un pétard mouillé. L’avantage fiscal est faible alors que le taux de fiscalité totale sur les contrats complémentaires est supérieur à 13 %. 

Solveig Godeluck, Les Echos