Durant la campagne électorale, François Hollande avait désigné la finance comme l’ennemi sans visage. Après la présentation hier du projet loi de financement de la Sécurité sociale 2013, cet ennemi est désormais bien cerné. Dans son ensemble, le secteur financier va contribuer pour près de 4 milliards d’euros en 2013 contre 3,1 milliards en 2011, soit une hausse de 30 %.
Les banques en première ligne
Honnie des banquiers, la taxe sur les salaires – touchant les sociétés non assujetties à la TVA -va être alourdie de 470 millions d’euros dans le secteur financier pour atteindre près de 3 milliards d’euros en 2013. Elle devrait concerner aux deux tiers les banques. Non seulement son assiette va être élargie à l’intéressement et à la participation, mais -c’est une surprise pour les banques -une tranche supplémentaire avec un taux marginal de 20 % va être créée pour les salaires dépassant 150.000 euros par an en vue d’adapter cette taxe « au développement des très hautes rémunérations », indique le projet. « C’est le type même de la mauvaise mesure qui va contre l’objectif premier du gouvernement de créer des emplois », regrette Ariane Obolensky, directrice générale de la Fédération bancaire française. Au total, avec la contribution pour frais de contrôle de l’ACP et la taxe de risque systémique, les taxes sur les seules banques vont augmenter d’un tiers pour atteindre près de 3 milliards d’euros en 2013.« On ne peut pas prélever de tels montants sur nos entreprises sans que cela ait un impact sur l’emploi et la capacité des banques à financer l’économie », prévient Ariane Obolensky.
Les assureurs aussi sollicités
L’annonce d’une taxation supplémentaire de 7 % sur les sommes placées sur leur réserve de capitalisation avait fait l’effet d’une douche froide la semaine dernière chez les assureurs. Ils jurent ne pas avoir vu venir cette nouvelle contribution exceptionnelle, qui arrive après l’« exit tax » de 10 % créée par la loi de Finances pour 2011. Cette mesure rapportera 800 millions supplémentaires en 2013.
L’élargissement de l’assiette de la taxe sur les salaires va également peser sur les assureurs qui ont acquitté 690 millions d’euros en 2011, soit en moyenne 11 % des salaires bruts. En outre, l’assiette de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés (C3S) du secteur sera revue pour être alignée sur la définition du chiffre d’affaires utilisée dans le cadre de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. L’Etat en attend un rendement de 55 millions d’euros.
Les fonds pas oubliés
« Mauvaise surprise » hier pour les fonds qui croyaient avoir évité le pire avec la réduction du plafonnement de déduction des intérêts d’emprunt (à 85 % contre 30 % du résultat initialement). Les revenus que les gestionnaires perçoivent au titre de leur plus-value d’investissement, le « carried interest », déjà encadrés en 2009, ne seront plus taxés comme tels, mais comme du salaire. Ils vont ainsi voir leur taux marginal monter de 34,5 %, à 64,5 %, voire 75 %. Une mesure qui devrait rapporter 110 millions d’euros à l’Etat. « Nous sommes conscients qu’il faut faire un effort collectif. Mais cela touchera ceux qui réussissent le mieux à faire croître les PME, en contrepartie d’une prise de risque personnelle équivalente à plusieurs années de salaires, ne décolère pas Louis Godron, le président de l’Afic, l’association des fonds. Ce régime est complètement dissuasif, extrême par rapport aux taux en Europe, de deux à trois fois inférieurs. C’est une invitation à changer de métier ou de pays. »