ANAËLLE GRONDIN
LES NOUVEAUX USAGES ET MODES DE CONSOMMATION ONT POUSSÉ LES COMPAGNIES D’ASSURANCES À REPENSER LEURS OFFRES DE A À Z. LA PRINCIPALE DIFFICULTÉ EST DE PROPOSER UNE OFFRE AVEC PEU DE RECUL SUR LA SINISTRALITÉ.
Covoiturage, location de son appartement… Les start-up de l’économie du partage sont un défi de taille pour les compagnies d’assurances. « Les pratiques sont basées sur des unités très petites : une nuitée, une heure, un kilomètre. Notre métier est transformé », témoigne Thomas Ollivier, responsable de l’économie collaborative à la Maif, à la tête d’une équipe de douze personnes. Le sur-mesure est devenu indispensable. Un exemple :
le service de location de bateaux entre particuliers, SamBoat,
bénéficie grâce à l’assureur d’« une assurance à la journée contre tout dommage ».
AXA France a adopté la même approche. Son directeur marketing, digital et service clients, Antoine Denoix, confie : « Depuis deux ans, nous avons une petite équipe dédiée aux start-up et à l’économie collaborative. Il a fallu recruter des personnes externes pour travailler avec elles, car ce n’était pas naturel pour AXA France d’avoir un dialogue avec de toutes jeunes entreprises. » BlaBlaCar, spécialiste du covoiturage,
fait partie des plates-formes qui ont choisi cet assureur
. « Par défaut, les covoitureurs sont couverts par la responsabilité civile du conducteur, comme lorsque l’on roule avec un ami ou un voisin. Or il y avait des besoins spécifiques en termes de garantie », souligne Gwenaël Moy, responsable de l’assurance chez BlaBlaCar. « On s’est par exemple aperçu qu’il y avait un problème en cas d’immobilisation du véhicule : les assureurs prenaient en charge le conducteur mais parfois pas les passagers. AXA nous a aidés à résoudre cela avec une assurance qui garantit l’arrivée à destination de tous les passagers en cas d’accident. »
Des propositions adaptées au fil de l’eau
De son côté,
Drivy, service de location de voitures entre particuliers
, a été l’un des premiers acteurs de l’économie collaborative à travailler avec Allianz. « Les voitures sont assurées à l’année par des particuliers. Pour une location sur Drivy, il faut remettre une assurance dessus. Ecrire un contrat qui dit “cette assurance vient remplacer une assurance existante”, ça n’existait pas ailleurs », souligne Pierre Beret, directeur risque et assurance de la start-up. La principale difficulté pour les assureurs est de devoir réfléchir à une offre avec très peu de recul sur la sinistralité et peu de données au départ. La route vers le contrat idéal peut parfois être longue, les plates-formes de l’économie collaborative évoluant à vive allure. Des points sont organisés régulièrement entre jeunes pousses et assureurs pour affiner les garanties.
« C’est important de comprendre ces nouveaux risques. Quand les comportements changent, on doit s’adapter », commente Virginie Fauvel, membre du comité exécutif d’Allianz France chargée du digital et du market management. L’assureur, qui s’appuie sur une dizaine de personnes pour répondre à ces nouveaux besoins, se trouve aussi derrière les garanties proposées par Cityscoot, service de location de scooters électriques en libre accès. Là encore, tout a été repensé de A à Z. « Nous avons, par exemple, recommandé de brider les vitesses ou de ne plus pouvoir utiliser le service à partir d’une certaine heure », indique Virginie Fauvel.
Antoine Denoix d’AXA France souligne « une logique de gagnant-gagnant » : « Nous apportons de la crédibilité, de la confiance à leur produit. Et, en retour, ces nouveaux usages nous font innover. » Néanmoins, ces partenariats ne représentent pas encore une part importante de l’activité des compagnies d’assurances. « Il n’y a pas de retour sur investissement » pour le moment, reconnaît Thomas Ollivier de la Maif. « Pour que ce type d’usage puisse devenir rentable pour un assureur, il faut énormément de volumes. Et, malgré l’essor de l’économie collaborative depuis trois ou quatre ans en France, ce n’est pas encore le cas. » Mais Virginie Fauvel est confiante : « C’est une activité qui va encore se développer fortement. » Désormais imprégnés de la culture de cette nouvelle économie, les assureurs se tiennent prêts.
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