Avantage aux acheteurs. Alors que les premières discussions sur les tarifs de la réassurance pour les renouvellements du 1er janvier 2016 vont s’engager à partir de ce week-end à Monte-Carlo, à l’occasion des traditionnels Rendez-vous de septembre, les assureurs gardent pour l’instant la main. Orienté à la baisse depuis plusieurs années, le marché devrait rester « souple », d’après l’agence de notation Moody’s. Son concurrent Standard & Poor’s estime aussi que « les prix vont continuer de décliner », mais « moins fortement » que précédemment. « Nous nous attendons à une baisse comprise entre 0 % et 5 % », avance Lotfi Elbarhdadi, chez S&P. Selon Fitch Ratings, les derniers renouvellements de juin-juillet indiqueraient toutefois que « les prix s’approcheraient d’un nouveau point d’équilibre ».
Un niveau élevé de catastrophes – naturelles ou d’origine humaine – d’ici à la fin de l’année peut évidemment toujours venir changer la donne. Mais, pour l’heure, l’exercice 2015 est plutôt bénin sur ce plan, avec une facture d’à peine 16,5 milliards de dollars (14,7 milliards d’euros) sur les six premiers mois de l’année pour les assureurs et leurs réassureurs, d’après les statistiques de Swiss Re.
Quant à l’environnement de marché, il met toujours sous pression la réassurance. Moody’s et Fitch conservent une perspective « négative » sur le secteur. Pour S&P, il n’y a « pas de répit en vue ».
Des capitaux qui affluent de toutes parts
Plus que jamais, l’offre est nettement supérieure à la demande sur le marché de la réassurance – ce qui a « largement contribué à faire baisser de manière continue les prix ces quatre dernières années », comme le rappelle Moody’s. L’industrie dispose toujours d’une surabondance de capitaux. A fin juin, ceux-ci s’élevaient au total à 565 milliards de dollars, en légère baisse de 2 % par rapport à fin 2014, d’après le courtier américain Aon Benfield. Le niveau des capitaux alternatifs apportés par des investisseurs – « hedge funds », fonds de pension, notamment – a, lui, atteint un nouveau plus haut, à 68 milliards de dollars (+ 6 %). Ceux-ci viennent chercher dans les obligations « catastrophe » ou la titrisation de risque « catnat » des rendements qu’ils ont plus de mal à trouver par ailleurs.
Des assureurs qui achètent moins et différemment
C’est une tendance marquée qui ne fait pas les affaires des réassureurs. Depuis quelques années, les grands assureurs globaux « rationalisent et optimisent leurs achats de réassurance, en achetant moins et auprès de moins d’acteurs », explique Standard & Poor’s. Ils ont en effet les moyens de garder plus de risques dans leur bilan. Cette stratégie serait également désormais adoptée par certains acteurs régionaux ou nationaux, particulièrement aux Etats-Unis et en Europe, constate S&P.
Les rapprochements entre assureurs vont peser sur la demande
La consolidation vigoureuse actuellement à l’oeuvre sur le marché de l’assurance – marquée en particulier par l’acquisition de l’assureur-dommages américain Chubb par son concurrent suisse ACE – n’est pas non plus une bonne nouvelle pour les réassureurs. Ces opérations de M&A sont en effet de nature à réduire encore la demande de réassurance, comme l’anticipe Moody’s. Les nouvelles entités combinées qui en résultent peuvent en effet jouer sur l’effet de diversification et les synergies pour réduire leur besoin de couverture. Plus grosses, elles seront aussi mieux placées pour discuter des tarifs avec leurs réassureurs. Il en va de même avec la concentration du marché du courtage, qui fait « basculer le pouvoir du côté des courtiers et des acheteurs », ajoute Standard & Poor’s