Un consensus se dessine pour s’attaquer une bonne fois pour toutes au dossier des contrats d’assurance-vie et de capitalisation non réclamés. Si les sommes en jeu ne représentent qu’une faible partie des encours totaux, elles sont significatives en valeur absolue. Selon un rapport de la Cour des comptes déjà cité par « Le Canard enchaîné », le montant des contrats en déshérence se chiffrait à 2,76 milliards d’euros « au minimum » en 2011, soit 0,2 % des encours de l’assurance-vie.
« Ce phénomène de sous-estimation statistique, couplé au fait que de plus en plus de ménages détiennent un contrat d’assurance-vie, conduit à penser que le nombre de contrats non réclamés est susceptible de gonfler significativement dans un avenir proche », précise l’institution de la rue Cambon dans le document dont « Les Echos » se sont procuré une copie et qui sera rendu public demain devant la commission des Finances de l’Assemblée nationale.
Le tableau dressé par la Cour des comptes est assez nuancé. Selon elle, les demandes faites aux assureurs, depuis une loi de 2007, d’identifier leurs assurés décédés et de rechercher les bénéficiaires des contrats « se sont révélées efficaces » : 1,78 milliard d’euros de prestations pour lesquelles le décès de l’assuré n’avait pas été porté à la connaissance de l’assureur ont ainsi pu être identifiés. Reste que « la loi du 17 décembre 2007 n’est pas intégralement appliquée par les assureurs », déplore la Cour, qui relève des « défaillances »dans l’application des dispositions relatives aux contrats non réclamés. Elle pointe notamment du doigt des consultations « tardives, voire inexistantes », du Répertoire national d’identification des personnes physiques (RNIPP).
Selon la Cour des comptes, il serait possible de débloquer la situation en imposant aux assureurs de transférer à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) les sommes dues au titre des contrats non réclamés « dix ans après le décès de l’assuré ou le terme du contrat ». Une telle mesure « aurait un caractère incitatif à l’égard des assureurs en matière de recherche des bénéficiaires, dans la mesure où les sommes versées aux bénéficiaires avant le transfert à la CDC sont susceptibles d’être réinvesties auprès du même assureur », explique-t-elle. « Cette solution nous irait parfaitement, et je l’ai d’ailleurs écrit au président de la première chambre de la Cour des comptes »,déclare aux « Echos » Bernard Spitz, le président de la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA).
Souvent accusés de dormir sur un pactole caché, les assureurs sont désireux de s’extirper de ce dossier . « La France est déjà l’un des pays qui a le dispositif le plus avancé en la matière. Mais il faut aller plus loin pour sortir de cette situation qui n’est satisfaisante pour personne et qui cause des dégâts d’image pour les assureurs », explique Bernard Spitz. Avec la récente loi bancaire, ces derniers seront obligés de s’informer chaque année du décès éventuel de l’assuré, quel que soit son âge, ainsi que l’avait suggéré le sénateur Hervé Maurey. « Si nous avions également le droit d’utiliser le numéro d’identification des personnes physiques, cela nous permettrait de régler une bonne partie du problème »,réclame Bernard Spitz. Ce qui servirait pour les cas d’homonymie lors de la consultation du RNIPP. Cette proposition figure dans le rapport de la Cour des comptes.
Mais surtout, « la profession est prête à faire un effort de plus avec la création d’un dispositif de place pour accélérer l’identification des bénéficiaires . C’est bien la preuve de notre volonté d’aboutir », annonce Bernard Spitz.
De son côté, la Cour des comptes préconise de « confier à l’Autorité de contrôle prudentiel l’élaboration d’une recommandation de bonnes pratiques relative aux contrats d’assurance-vie non réclamés ».