Solveig Godeluck

Le gouvernement lance une grande concertation citoyenne sur la réforme. Il promet de ne pas toucher à l’âge légal de départ à la retraite.
Dans une interview au « Parisien », jeudi, le haut-commissaire à la Réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, assure qu’il n’est pas question de repousser l’âge minimum de départ à la retraite, réitérant une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. « L’âge actuel de 62 ans devrait être conservé », affirme-t-il. C’est la première fois qu’il s’exprime dans la presse depuis l’ouverture, en avril, d’
une concertation de huit mois
avec les partenaires sociaux. Jean-Paul Delevoye sort de sa réserve pour inaugurer
un dispositif de participation citoyenne
– plate-forme Internet, ateliers en régions – destiné à recueillir les contributions de tous les Français jusque fin octobre. Dans
le futur système de retraite par points
, où chaque euro cotisé donnera les mêmes droits à chacun, nul besoin en théorie de fixer un âge légal minimal : les assurés partent quand ils ont suffisamment de points pour toucher la pension souhaitée.

Mais il faut un garde-fou, insiste ce proche du chef de l’Etat. « Nous pensons que si l’on supprime toute référence, nous pouvons nous retrouver avec un certain nombre de personnes qui, comme en Suède, partiront plus tôt mais se retrouveront avec de toutes petites retraites », explique Jean-Paul Delevoye. Et le risque de dérapage des coûts n’est pas négligeable. Sans cette limite de l’âge minimum, les petits salaires peuvent en effet avoir intérêt à écourter leur carrière et à toucher des minima sociaux.
Des propos qui rassurent en tout cas les partenaires sociaux. Jeudi, lors d’un rendez-vous organisé par l’Association des journalistes d’information sociale, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a brossé le portrait d’un Jean-Paul Delevoye « pas dogmatique », « entouré de gens très compétents », « avec
une vraie volonté de concertation
» et « qui ne pointe pas des responsables coupables de tous les maux ». La centrale syndicale réclame depuis 2010 une réforme systémique des retraites et est donc prête à jouer le jeu. Laurent Berger n’en est pas moins catégorique sur la question de l’âge de départ : « Si c’est une réforme avec des mesures paramétriques, pour nous, c’est non. » Cependant, le minimum légal à 62 ans n’empêchera pas le curseur de l’âge effectif de départ à la retraite de reculer. Les assurés retarderont leur départ au fil des générations pour que leurs pensions ne se réduisent pas au fur et à mesure que le ratio cotisants/pensionnés s’érode. Même le patronat, qui soutenait le projet de la droite de reculer l’âge minimum, est prêt à rester à 62 ans pourvu que le système change : « Nous devons inciter les assurés à partir plus tard que l’âge légal, comme nous l’avons fait avec notre accord à l’Agirc-Arrco », le régime complémentaire de retraite, insiste le négociateur de la réforme côté Medef,
Claude Tendil, aux « Echos »
. « Il faudra mettre en place une nouvelle décote suffisamment forte pour que les gens soient incités à partir vers un âge garantissant l’équilibre du système. »

La CFDT « vigilante » sur les carrières longues
De plus, quid des départs anticipés pour les carrières longues ? La CFDT avait obtenu l’instauration de ce dispositif favorable aux assurés ayant commencé à travailler très jeunes. Or dans un système par points, on ne compte plus les années passées au travail, on se contente d’enregistrer les cotisations.
Laurent Berger a expliqué qu’il serait « vigilant » sur les carrières longues, mais aussi sur les femmes ayant eu des enfants et sur la pénibilité : les dispositifs donnant droit à des trimestres supplémentaires devront être transposés. « Le nouveau système doit permettre de calculer une durée de cotisation minimum pour partir à la retraite », considère le leader syndical. Une façon de ressusciter les annuités tout en adoptant la retraite par points.
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