Où en êtes-vous de votre transformation ?
Depuis la crise, nous avons oeuvré pour recentrer l’entreprise sur ses activités coeur de métier et la rendre moins exposée à des risques variés. AIG avait en effet grandi au point d’être devenu trop diversifié, bien au-delà de ses activités d’assurance. La crise financière a été un moment où la vulnérabilité de ce modèle est apparue. Depuis, nous avons vendu plus de 90 sociétés et nous sommes séparés de quasiment tous les produits dérivés qui étaient au bilan. Aujourd’hui, la compagnie compte environ 500 milliards de dollars d’actifs, contre plus de 1.000 milliards de dollars avant 2008, et un montant de capitaux propres d’environ 90 milliards de dollars. Mais avec 90 millions de clients dans près de 100 pays, AIG reste, à bien des égards, la première compagnie d’assurances mondiale.

Quel est votre objectif principal ?
Notre stratégie est de nous concentrer sur la valeur, pas sur les volumes. C’est essentiel pour pouvoir augmenter notre rentabilité. Nous nous focalisons donc sur les produits, les clients et les pays qui apportent le plus de valeur. L’un de nos axes prioritaires est d’accompagner les grandes entreprises dans la gestion de leurs risques. Cela nous donne une expertise qui nous permet d’aider aussi les entreprises de taille moyenne qui exportent.

Début 2016, certains actionnaires activistes réclamaient une scission d’AIG en plusieurs entités. Vous avez écarté cette possibilité. Pourquoi ?
Nous sommes certes d’abord un assureur-dommages global, mais nous avons aussi l’une des principales compagnies d’assurance-vie aux Etats-Unis. C’est très utile d’avoir une source de diversification de ce type. L’assurance-vie procure en effet des cash-flows stables permettant de contrebalancer la volatilité des activités d’assurance-dommages, qui peuvent subir des chocs annuels majeurs comme une ou plusieurs catastrophes naturelles.

Vendrez-vous d’autres actifs ?
Nous sommes en train de céder notre filiale d’assurance hypothécaire United Guaranty Corporation sous la forme une introduction en Bourse. Et nous étudions les moyens de simplifier encore la compagnie.

A contrario, envisagez-vous des acquisitions ?
Pas de grandes acquisitions, en tout cas. Nous avons annoncé un important programme de redistribution de capital à nos actionnaires, puisque nous voulons leur retourner au moins 25 milliards de dollars supplémentaires en 2016 et 2017, après les 12 milliards déjà distribués en 2015. Pour le moment, il nous semble que le rachat d’actions AIG est une proposition particulièrement attractive pour les actionnaires. Cela ne nous empêche pas d’être ouverts à de plus petites acquisitions pouvant nous donner accès à de nouveaux marchés ou à de nouvelles technologies. La croissance externe peut aussi passer par la création de coentreprises. Cette année nous nous sommes alliés à Two Sigma Investments et Hamilton Insurance pour construire une plate-forme technologique sur le marché américain des PME.

Le Big Data peut-il se substituer au métier d’assureur ?
Notre industrie est en train d’évoluer rapidement, la technologie et les données donnant davantage d’éclairage sur les risques. La science est un outil important. Mais la solution optimale passera par un équilibre entre l’art et la science. Les techniques d’analyse prédictive doivent être combinées avec l’expertise et l’intuition des souscripteurs, et des gestionnaires de sinistres.

Les taux bas sont-ils le principal risque pour les assureurs ?
Je ne les vois pas tant comme un risque que comme une réalité persistante de la vie quotidienne à laquelle il faut s’adapter. Traditionnellement une compagnie d’assurances gagne de l’argent de deux manières : en souscrivant des risques et en investissant les primes encaissées en attendant de payer des sinistres. Pour garder une rentabilité acceptable dans l’environnement actuel, il faut être encore plus efficace dans la souscription. Ce qui suppose, en particulier, de faire évoluer le « business mix » et d’arrêter les activités trop dépendantes des revenus financiers. Cela nous a conduits par exemple à nous séparer de plusieurs grandes activités d’assurance-vie à l’international.

AIG est l’un des neuf grands groupes d’assurances mondiaux considérés comme « systémiques » : est-ce justifié ?
D’un point de vue systémique, le bilan d’une compagnie d’assurances est plus stable que celui d’une banque. Un assureur a des passifs de long terme et des actifs liquides. A l’inverse, les banques ont des dépôts de court terme et une majorité d’actifs illiquides. J’ajoute que le montant des produits dérivés est beaucoup plus faible chez un assureur. Contrairement à MetLife, nous n’avons cependant pas contesté notre statut de « systémique ». Mais nous nous réservons la possibilité de le faire selon la manière dont ces règles évolueront.

Laurent Thévenin, Les Echos

Fonte: