La facture est bien plus lourde qu’attendu : Volkswagen vient de conclure un accord à 14,7 milliards de dollars pour solder une partie de ses déboires avec la justice américaine, suite au scandale provoqué par ses moteurs diesel truqués. L’amende est, de très loin, la plus importante jamais infligée dans le secteur automobile. Bonne nouvelle : le groupe a mis de côté 16 milliards d’euros. Mauvaise nouvelle : d’autres factures doivent suivre, sans omettre les ventes perdues…

Dans le détail, Volkswagen s’engage à offrir jusqu’à 10 milliards de dollars d’indemnisation à ses clients américains. Il propose de racheter les 500.000 voitures touchées par le scandale, et de verser une indemnisation de 5.100 à 10.000 dollars à leurs propriétaires, s’ajoutant à la valeur estimée de leur véhicule en septembre 2015 – date à laquelle le scandale a éclaté. Selon Edith Ramirez, la présidente de la Federal Trade Commission, les montants de ces rachats de véhicules s’échelonneront entre 12.500 et 44.000 dollars, selon les modèles.

Au titre des dégâts sur l’environnement, le groupe versera aussi 2,7 milliards de dollars à un fonds écologique pour compenser ses émissions de carbone. Il s’engage par ailleurs à investir 2 milliards dans le développement de véhicules à zéro émission. Un accord avec la plupart des Etats fédéraux (44 sur 50) a été annoncé en parallèle, alourdissant la facture de 600 millions supplémentaires.

La pression monte en Europe

Volkswagen n’en a pas pour autant fini avec la justice américaine. Des amendes civiles et pénales pourront encore être prononcées par le ministère de la Justice, suite à l’enquête ouverte en janvier. L’accord annoncé mardi ne couvre pas, non plus, les 80.000 voitures de plus grosse cylindrée, vendues aux Etats-Unis sous les marques Porsche, Volkswagen et Audi, dont les émissions polluantes étaient, elles aussi, supérieures aux seuils légaux.

« Nous prenons très au sérieux la mission que nous nous sommes fixé, à savoir faire bien les choses, et considérons ce règlement comme un important pas en avant », a déclaré le patron du géant automobile Matthias Müller.

Après cet accord, la pression monte sur le groupe en Europe, où il a commercialisé l’essentiel des 11 millions de véhicules truqués. Juridiquement, le cadre est certes différent et ne l’oblige pas à compenser de la même manière les clients, dont il s’est engagé à rappeler les véhicules. Les émissions d’oxyde d’azote sont « une donnée contractuelle aux Etats-Unis, elle ne l’est pas en Europe », comme l’avait indiqué en février, à l’Assemblée nationale, le patron de Volkswagen France, Jacques Rivoal.

Pour autant, les consommateurs ne baissent pas les bras. En Allemagne, le tribunal de Lunebourg a donné raison en première instance, lundi, à un client ayant porté plainte contre un concessionnaire de la marque. Le juge a estimé que le délai de réparation de deux mois n’ayant pas été respecté, l’acheteur était en droit d’annuler son contrat. Il doit donc être remboursé d’un montant correspondant au prix d’achat moins l’indemnité d’utilisation. Volkswagen peut encore faire appel de ce jugement, qui n’est pas le premier du genre outre-Rhin.

Gregor Kolbe, spécialiste du dossier Volkswagen à la centrale des consommateurs allemands, craint que la bataille judiciaire s’éternise et attend un geste politique. « Compte tenu des liens entre Berlin et Wolfsburg, nous demandons au gouvernement allemand qu’il fasse pression sur Volkswagen pour que celui-ci rembourse ses clients européens », dit-il. Jusqu’ici, le ministre des Transports, sensible au poids économique du groupe, n’a pas fait ce geste.

Mais, alors que des plaintes en nom collectif ont été déposées ou se préparent en Europe, la pression vient aussi de Bruxelles. « Volkswagen devrait verser volontairement aux propriétaires de voitures européens une compensation comparable à celle qu’il va verser aux clients américains », a déclaré récemment Elzbieta Bienkowska, la commissaire européenne à l’Industrie.

Lucie Robequain, Les Echos
Thibaut Madelin, Les Echos
Julien Dupont-Calbo, Les Echos
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