La déferlante un temps redoutée par les assureurs n’est pas arrivée. Ceux-ci disent ne pas avoir subi un afflux massif de résiliations depuis l’entrée en vigueur de la loi Hamon, qui permet, depuis le 1er janvier 2015, aux assurés de changer de contrats auto ou habitation à tout moment dès lors qu’ils ont un an d’ancienneté. Les assureurs expliquent avoir surtout vu des clients profiter de cette disposition pour aller s’assurer ailleurs sans attendre la date anniversaire. Mais « le nombre de résiliations anticipées a été compensé par une baisse du nombre des résiliations à l’échéance », décrivait mardi Nicolas Gomart, le directeur général de la Matmut, devant l’Association nationale des journalistes de l’assurance. Chez l’assureur mutualiste rouennais, ces résiliations anticipées ont représenté 10 % du volume total de résiliations.
Groupama avait, lui aussi, affirmé ne pas avoir ressenti d’effet particulier de la loi Hamon en 2015, hormis ces sorties anticipées. « Mais cela a l’air de s’accélérer sur le début 2016 », avait signalé son directeur général, Thierry Martel, lors de la présentation des résultats annuels du groupe en mars. « Selon les déclarations des partenaires assureurs présents sur notre panel, le volume d’affaires nouvelles dues à la loi Hamon représente en moyenne 15 % de leur volume global », indique pour sa part Hamid Benamara, le directeur général du comparateur LesFurets.com.
L’an dernier, le marché avait déjà commencé à bouger un peu. Chez Covéa (GMF, MAAF, MMA), la loi Hamon a ainsi augmenté le volume de rotation des portefeuilles de 7 %. D’après les chiffres présentés fin janvier par l’Association française de l’assurance, le turnover global des portefeuilles sur le marché a augmenté en 2015 de 1,1 point en auto (pour atteindre 14,9 % en moyenne) et de 1,5 point en habitation (à 14,1 %).
Comme attendu, les grands gagnants seraient les bancassureurs, qui ont fait de l’assurance auto et habitation un axe de développement majeur. Pacifica (Crédit Agricole Assurances) déclarait, par exemple, que la loi Hamon « lui profitait plus qu’attendu » (« Les Echos » du 18 février). « Les transferts de portefeuille se font au profit des bancassureurs qui tirent leur épingle du jeu grâce à la capillarité de leurs réseaux de distribution, de leur proximité, connaissance et interaction régulière avec leurs clients », confirme Hamid Benamara.
Modération tarifaire
Cela dit, « s’il y a un effet de la loi Hamon, il n’est pas colossal. Les Français restent encore très fidèles à leurs assureurs », souligne Stanislas di Vittorio, le président et fondateur du comparateur Assurland. Selon lui, « le vrai impact de cette loi réside pour l’instant moins dans une hausse du nombre des résiliations que dans la modération tarifaire dont font preuve les assureurs pour défendre leur portefeuille. » D’après Stanislas di Vittorio, il faudra attendre plusieurs années pour voir si la loi Hamon aura changé la dynamique de marché. « La vraie interrogation est de savoir si elle va créer une accoutumance à la résiliation et transformer l’assurance en un produit de commodité », avance-t-il.
Laurent Thévenin, Les Echos
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