En l’espace d’un mois et demi, la justice néerlandaise a rendu pour la deuxième fois un jugement accablant à l’encontre des plus hauts responsables de l’ex-groupe de bancassurance belgo-néerlandais, depuis scindé, la banque belge revenant à BNP Paribas, l’assurance belge devenant Ageas et la branche néerlandaise étant intégrée à ABN Amro. Après la sentence du tribunal d’Utrecht de février dernier où Jean-Paul Votron et Gilbert Mittler avaient été reconnus coupables de tromperies à l’égard des actionnaires, la Chambre des entreprises d’Amsterdam, saisie par l’association des petits porteurs néerlandaise VEB, a confirmé la semaine dernière la mauvaise gestion patente du groupe avant son sauvetage par les Etats belge et néerlandais fin 2008.
Tableau édifiant
Les faits reprochés aux anciens dirigeants se situent entre 2007 et 2008 et plus précisément à partir de la reprise d’ABN Amro jusqu’à la nationalisation du bancassureur. Le tableau de la gestion dressé par le tribunal d’Amsterdam est édifiant. Selon les juges, une kyrielle d’éléments tend à montrer le caractère systématique des mensonges et des supercheries dans les informations fournies aux marchés et aux investisseurs durant cette période. Par exemple, cette mise à jour plus qu’approximative des engagements sur le portefeuille de crédits immobiliers américain qui a donné une image fausse de la réalité. Les silences des dirigeants sur des dossiers sensibles sont aussi éloquents. Fortis a ainsi omis d’informer à temps le public sur les conséquences financières de la rupture de son accord avec le groupe chinois Ping An. De même, la vérité a été déformée pour expliquer la facture de 800 millions d’euros supplémentaires lors de la vente de la filiale HBU.
En outre, la justice relève l’imprudence de la politique d’investissements qui a mis à mal la solvabilité du groupe. En filigrane, face à ses engagements « subprimes » sur le marché américain, Fortis a opté pour une fuite en avant en pariant sur des retours d’investissements qui ne se sont jamais produits. Enfin, le tribunal s’est appesanti sur cette émission d’actions de 13 milliardsJan Maarten Slagter d’euros aux allures d’opération de la dernière chance pour Fortis. Il a relevé qu’à cinq reprises, les déclarations publiques des dirigeants avaient induit les actionnaires en erreur.
Pour la VEB, cette décision est une nouvelle brèche pour une indemnisation des actionnaires Selon son directeur, Jan Maarten Slagter, cette décision « représente un soutien important contre Ageas (le successeur de Fortis) et l’ancienne direction ». L’association espère que la direction actuelle d’Ageas utilisera cet arrêt pour se retourner contre l’ancienne direction. « Ce sujet est à l’agenda de la prochaine assemblée des actionnaires d’Ageas. » Celle-ci se déroulera les 25 et 26 avril, respectivement à Bruxelles et Utrecht.