Rien ne va plus. Déjà bloquée depuis des mois sur le plan politique par les retards pris par la rédaction de la nouvelle Constitution, la Thaïlande est tout aussi paralysée au niveau économique.

La junte, au pouvoir depuis presque deux ans, vient en effet d’appeler les riziculteurs, confrontés à l’une des pires sécheresses des cinquante dernières années, à abandonner une partie de leurs cultures et à se diversifier. En janvier, 25 à 30 % des superficies consacrées à la culture de cette céréale n’ont pas pu être repiquées, constate l’USDA. Le Royaume devrait produire cette année autour de 25 millions de tonnes de riz, contre 34,2  millions de tonnes en 2014. De nombreux producteurs sont actuellement incapables de faire pousser du riz en raison du manque d’eau. D’après les chiffres du département de l’irrigation, les réserves en eau des barrages ont chuté en dessous des niveaux de l’an dernier, qui étaient déjà considérés comme un niveau record. Les zones du pays les plus directement concernées sont le nord et le centre. Au total, 12 provinces sur 76 ont été en situation de catastrophe naturelle.

« Nous devons trouver le moyen de motiver les producteurs de riz pour qu’ils passent à d’autres cultures », a déclaré Prayut Chan-o-Cha. Ces problèmes de sécheresse devraient être pris en compte dans les plans de développement à long terme a précisé le chef de la junte, l’homme fort du régime. Comprendre : la Thaïlande, qui reste l’un des principaux exportateurs mondiaux de riz, se trouve aujourd’hui concurrencée par le Vietnam et l’Inde, et doit donc chercher de nouvelles pistes de développement. Partant de ce constat, la junte met sur pied un plan sur vingt ans pour diversifier le secteur agricole et le faire monter en gamme. La démarche de Prayut s’applique à l’ensemble de l’économie, en perte de vitesse. En janvier, les exportations (15,7 milliards de dollars sur un an) ont chuté de près de 9 %, alors que plus de 60 % de la croissance repose sur les ventes à l’étranger. Ce nouveau plongeon intervient après une année 2015 déjà noire (-5,8 %). Et ce n’est pas terminé : depuis le début de l’année, plusieurs secteurs clefs connaissent des difficultés : le caoutchouc, les plastiques, les pièces d’ordinateurs et les produits chimiques. Ces problèmes sont doublés d’une chute vertigineuse des investissements étrangers : -78 % entre janvier et novembre. Bangkok paie là son instabilité politique, qui a pris le pas sur son potentiel économique. Et dont les voisins – le Vietnam, le Cambodge et la Birmanie – profitent pour tracer leur route.

Michel De Grandi, Les Echos

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