Alors que les partenaires sociaux négocient en ce moment pour trouver 5 milliards d’euros d’économies sur les régimes complémentaires Agirc et Arrco, la question des décotes revient sur le tapis. Le Medef propose de reculer l’âge de la retraite à taux plein pour ces régimes, en appliquant des abattements dégressifs sur les pensions entre 62 ans et 67 ans. Il s’agirait cependant d’abattements temporaires, donc moins douloureux que les décotes à vie en vigueur pour le régime général.
Fort à propos, la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (Cnav) vient de publier son premier bilan de la réforme des retraites de 2003. A l’époque, il avait été décidé de porter la durée de cotisation de 152 trimestres à 165 trimestres et de réduire la décote. Avant 2003, la pension de base mensuelle chutait de 10 % par année manquante. Après, la décote n’était plus que de 5 %.
L’étude de la Cnav montre les effets de la baisse des pénalités associées à une durée de cotisation insuffisante. La Cnav a observé les générations nées entre 1944 et 1948, qui ont maintenant dépassé l’âge de la retraite à taux plein (67 ans). La baisse des pénalités n’a pas incité à partir à la retraite plus nombreux avec une décote. Mais on constate une divergence entre les deux sexes. « La part des pensions minorées parmi les femmes prestataires est passée de 7 % pour les assurées nées en 1944 à 8 % pour celles nées en 1948. La féminisation de la population des “décoteurs” s’est ainsi accentuée avec la montée en charge de la réforme des retraites de 2003 », écrit la Cnav. Car les hommes sont au contraire de moins en moins nombreux à subir la décote : de 7 % pour la génération 1944, le taux est passé à 5 % pour celle de 1948.
Ce mystère s’explique par les différences de carrière. Celles des femmes sont toujours plus heurtées que celles de leurs conjoints, avec les maternités et les congés parentaux. La durée de cotisation s’allongeant, elles devraient en théorie travailler encore plus tard. Mais ce n’est pas si facile. D’ailleurs, les « décoteuses » sont plus nombreuses à s’acharner en vain à chercher un emploi avant de se résoudre à prendre leur retraite à taux réduit (74 % n’ont pas validé de trimestre l’année précédant leur départ). A l’inverse, les hommes profitent à fond du dispositif carrières longues qui permet de prendre une retraite anticipée à taux plein. Pour eux, l’âge moyen du départ à taux plein, 60,3 ans, est devenu inférieur à celui des « décotés » (60,6 ans).