LAURENT THÉVENIN
LA COLLECTE NETTE A FLÉCHI L’AN DERNIER, EN TOMBANT À 16,8 MILLIARDS D’EUROS, CONTRE 23,6 MILLIARDS EN 2015. SELON LES CAHIERS DE L’EPARGNE-PAIR CONSEIL, ELLE DEVRAIT REPASSER AU-DESSUS DES 20 MILLIARDS EN 2017.
L’année 2016 ne restera pas un grand millésime pour l’assurance-vie. Selon les statistiques publiées mardi par la Fédération française de l’assurance, la collecte nette (versements moins prestations) s’est élevée à 16,8 milliards d’euros. Un montant nettement en deçà des niveaux atteints en 2015 (23,6 milliards d’euros) et en 2014 (22,6 milliards). « C’est une performance un peu faible quand on prend l’ensemble du marché des placements financiers, qui tourne autour de 105 milliards d’euros », commente Cyril Blesson, des Cahiers de l’Epargne-PAIR Conseil. Le décrochage s’est produit à partir de la rentrée. Après être tombée dans le rouge au mois de septembre (-600 millions d’euros), la collecte nette a affiché ensuite trois petits mois. Et, sur décembre, le solde a atteint 800 millions d’euros.
Interrogations sur la loi Sapin II
Dans le détail, les épargnants auront un peu moins versé sur leurs contrats d’assurance-vie en 2016 (134,7 milliards d’euros) qu’en 2015 (135,5 milliards d’euros). Dans le même temps, les prestations ont augmenté, passant de 112,1 milliards d’euros en 2015, à 117,9 milliards d’euros. « La collecte nette est tendanciellement freinée par la hausse des flux de sortie. Ceux-ci vont en effet augmenter à mesure que les encours vieillissent », explique Cyrille Chartier-Kastler, président du cabinet Facts & Figures. Parmi les vents contraires de 2016, figurent les interrogations manifestées cet automne par les épargnants sur la loi Sapin II, qui prévoit la possibilité de restreindre ou de bloquer temporairement les rachats sur leurs contrats d’assurance-vie. « L’impact de la loi Sapin II est difficile à mesurer, mais cela a certainement contribué à déprimer la collecte nette à partir de septembre. Son effet semble se dissiper un peu au vu des chiffres de décembre », estime Cyril Blesson. Pour ce dernier, il y a aussi « un effet d’offre négatif sur les fonds euros ». Certains assureurs font tout pour limiter les versements sur les fonds euros – dont la garantie du capital leur coûte cher en termes de fonds propres à immobiliser – et pour pousser davantage les épargnants vers les supports en unités de compte (UC), plus risqués. « Or les ménages restent attachés à la sécurité des fonds euros. Cela a donc pu en détourner certains de l’assurance-vie », souligne Cyril Blesson.
Appétit pour l’immobilier
Les assureurs-vie ont par ailleurs toujours du mal à vendre des UC. Ces supports sont censés offrir une meilleure performance sur la durée que les fonds euros car ils sont investis pour partie en actions. Ils n’ont pourtant représenté qu’à peine 20 % des cotisations en 2016, même si les derniers mois de l’année ont été un peu mieux orientés. Enfin, l’appétit des Français pour l’immobilier a également pu entraîner certains arbitrages défavorables à l’assurance-vie. Malgré tout, l’encours total des contrats d’assurance-vie a progressé de 3 % sur un an, à 1.632 milliards d’euros. « Que la collecte nette ait diminué arrange plutôt les assureurs, puisque cela leur a évité d’avoir à trop acheter d’obligations à faible rendement. En revanche, leurs encours ont augmenté et c’est l’essentiel pour eux, puisque ce sont les encours qui font les revenus en assurance-vie », explique Cyrille Chartier-Kastler. Autre point positif pour les assureurs, avec des retraits concentrés essentiellement sur les fonds euros, la collecte nette s’est faite à 84 % sur les UC en 2016.
Vers un taux du Livret A à 1,25 %
L’année 2017 s’annonce quant à elle pleine d’incertitudes, à commencer par les élections présidentielle et législatives, toujours susceptibles de provoquer de l’attentisme chez les épargnants. L’autre inconnue concerne les taux. « L’évolution de l’OAT sera déterminante pour voir si les assureurs pourront rouvrir ou non les vannes sur les fonds euros. Si elle remontait à 1,5 %, cela ne leur poserait aucun problème pour collecter de nouveau beaucoup sur ces supports », affirme Cyrille Chartier-Kastler.
Une possible remontée de la rémunération du Livret A pourrait par ailleurs freiner un peu la collecte d’assurance-vie, alors que les fonds euros vont rapporter en moyenne moins de 2 % au titre de 2016. « On se dirige vers une hausse du taux du Livret A en août, qui devrait s’établir, selon nos prévisions à 1,25 % au regard de la formule de calcul actuelle », indique Cyril Blesson.
Selon Les Cahiers de l’Epargne-PAIR Conseil, la collecte nette d’assurance-vie devrait toutefois se redresser un peu cette année et repasser au-dessus des 20 milliards d’euros, « mais sans pour autant retrouver son niveau de 2015 ».
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