Les autorités de régulation italiennes sont sous les feux de la rampe dans le dossier FonSai, l’assureur convoité à la fois par la coopérative Unipol et les fonds d’investissement Palladio et Sator. Vendredi, Unipol a déposé son projet auprès de l’Institut de veille des assurances privées (Isvap) et de la Commission des opérations de Bourse (Consob). Il se propose d’investir 1 milliard d’euros pour acquérir Premafin, le holding de contrôle de FonSai, pour ensuite recapitaliser les sociétés mère et fille, et enfin fusionner avec elles. Unipol attend notamment de la Consob le droit d’être exempté d’offre publique d’achat (OPA) sur FonSai. Le verdict est très attendu : c’est parce que cette dernière avait requis l’obligation d’OPA que le français Groupama, voilà un an, avait renoncé à entrer au capital de FonSai.

Source d’embarras autrement plus sérieuse pour la Consob et l’Isvap, les doutes se confirment concernant les parts réellement détenues aujourd’hui dans Premafin par la famille de l’ingénieur sicilien Salvatore Ligresti. Celle-ci détient officiellement 51 % de Premafin. Mais la Consob vient d’informer le marché que les Ligresti étaient liés à plusieurs sociétés offshore domiciliées dans des paradis fiscaux, lesquelles sont en possession de 20 % de Premafin (« Les Echos » du 4 mars 2011). « On est heureux de l’apprendre et cela suscite la curiosité », a ironisé l’économiste Alessandro Penati dans « La Repubblica », en fin de semaine dernière. Ce professeur de finances des entreprises à l’Université catholique de Milan s’étonne qu’aucune suite n’ait encore été donnée à cette révélation, les Ligresti refusant de s’expliquer sur le sujet. D’où son interpellation : « La Consob va-t-elle sanctionner l’absence d’information de la part des parties concernées ? Qu’en dit l’Isvap ? Ne peut-on pas présumer que les Ligresti aient soustrait à l’impôt certains de leurs dividendes ? Les banques créancières et les banques-conseils étaient-elles au courant ? »

Patate chaude

L’Isvap renvoie la patate chaude à la Consob, en affirmant être chargé de surveiller la solvabilité des acteurs de l’assurance, pas l’identité de leurs actionnaires. A la Consob, on se contente pour le moment de rappeler les amendes qu’encourt tout contrevenant aux déclarations de franchissement de seuil dans les entreprises cotées. Du côté des créanciers, UniCredit fait la sourde oreille et Mediobanca, visiblement gêné, dit s’être « fié jusqu’ici aux déclarations des actionnaires ». La banque dirigée par Alberto Nagel, exposée à hauteur de 1,5 milliard d’euros dans ce dossier, souhaite voir aboutir au plus vite la solution Unipol.

Aucun commentaire, non plus, chez Banca Leonardo, dont le patron, Gerardo Braggiotti, a multiplié les rendez-vous ces dernières heures. Banquier-conseil de Premafin, ce dernier examine la contre-offre des fonds Palladio et Sator, détenteurs de 8 % de FonSai et candidats à la recapitalisation de Premafin pour 400 millions d’euros. Les mauvaises langues racontent qu’il aurait accueilli les fonds avec d’autant plus de bienveillance qu’il est, comme Matteo Arpe, patron de Sator, un ancien de Mediobanca. Dans les années 1990, les deux hommes se voyaient en dauphins d’Enrico Cuccia, fondateur de l’établissement. Tous deux évincés, ils trouveraient aujourd’hui l’occasion de se venger. « Nous sommes absolument impartiaux », se défend Banca Leonardo. L’affaire, du reste, semble pliée. Comme le relevait hier le « Corriere della Sera », Premafin et FonSai ont signé avec Unipol un engagement de négociation exclusive leur interdisant de traiter avec tout autre candidat, sous peine de devoir payer des pénalités « très élevées ».

CORRESPONDANT À ROME
Guillaume DELACROIX